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Cyberattaque inédite au Maroc : deux millions de victimes

« Les données ne sont plus une ressource : ce sont des armes. » Cette phrase, souvent citée dans les milieux de la cybersécurité, résonne avec une violence particulière depuis l’attaque numérique d’ampleur qui a frappé le Maroc début avril 2025. En l’espace de quelques jours, les données personnelles de près de deux millions de citoyens et de centaines de milliers d’entreprises ont été compromises, mettant à nu les fragilités du système numérique national.

Cyberattaque inédite au Maroc : deux millions de victimes

Début avril 2025, le Maroc a été la cible d’une cyberattaque d’une intensité inédite, orchestrée par un groupe de hackers se revendiquant algérien et opérant sous le nom de « Jabaroot DZ ». Cette opération, dirigée contre des institutions publiques majeures comme la Caisse nationale de sécurité sociale (CNSS) et le ministère de l’Emploi, a entraîné la publication sur Telegram de fichiers contenant les données personnelles de près de deux millions de citoyens marocains.

Parmi les informations compromises figuraient des listes d’entreprises, les salaires de leurs employés, des numéros de cartes d’identité, des coordonnées bancaires ainsi que des historiques professionnels – une fuite d’une ampleur sans précédent dans l’histoire du Royaume. Face à l’onde de choc provoquée par cette divulgation massive, les autorités ont tenté de minimiser l’impact en assurant que les données dites « critiques » n’avaient pas été touchées.

Toutefois, la CNSS a activé son protocole de sécurité, suspendu certaines fonctionnalités de ses plateformes en ligne, et engagé une enquête en collaboration avec des services spécialisés. L’utilisation supposée d’intelligence artificielle par les attaquants, visant à automatiser et amplifier les intrusions, ajoute un niveau d’inquiétude supplémentaire pour les experts en cybersécurité.

Cyberespace : nouvelle frontière du conflit Maroc-Algérie

Cette cyberattaque survient dans un contexte diplomatique déjà explosif entre le Maroc et l’Algérie. Depuis août 2021, les relations entre les deux pays sont rompues : fermeture de l’espace aérien algérien, interruption des flux de gaz naturel, durcissement des visas. Le cœur du contentieux reste le Sahara occidental, revendiqué par le Maroc et soutenu, côté algérien, par le mouvement indépendantiste Front Polisario.

Dans ce climat de méfiance extrême, le cyberespace devient un nouvel espace de confrontation. Le groupe « Jabaroot DZ » a revendiqué l’attaque comme une réponse à un piratage supposé du compte Twitter de l’Agence de presse algérienne (APS) par des acteurs marocains. Ce type d’agression numérique, difficile à attribuer officiellement mais fortement symbolique, marque une mutation du conflit régional vers des formes hybrides : désinformation, sabotage technologique, et guerre d’influence.

« Le numérique est devenu un prolongement des rapports de force entre États », analyse Youssef El Bakkali, chercheur en cybersécurité à Rabat. « Dans cette affaire, le message est aussi politique que technique. »

Un signal d’alarme pour la cybersécurité nationale

Cette affaire met crûment en lumière les lacunes en matière de cybersécurité au Maroc. Bien que le gouvernement ait entrepris des efforts ces dernières années, ceux-ci apparaissent désormais insuffisants face à l’évolution rapide des menaces numériques. Le gouvernement a annoncé vouloir accélérer la mise en œuvre d’une stratégie nationale renforcée pour protéger ses infrastructures critiques et sensibiliser les administrations comme les citoyens.

Sur les réseaux sociaux, plusieurs victimes présumées affirment avoir reçu des e-mails de phishing peu après la fuite de leurs coordonnées, preuve que les impacts de l’attaque ne sont pas seulement symboliques, mais bien réels et immédiats.

Conclusion : une souveraineté numérique à construire

Cette cyberattaque marque un tournant. Elle souligne l’urgence de considérer la cybersécurité comme un pilier stratégique de la souveraineté nationale, au même titre que la défense ou l’énergie. Face à une menace de plus en plus sophistiquée, le Maroc doit bâtir une réponse articulée autour de la prévention, de la coopération régionale et de la formation.

Les prochaines semaines seront décisives. Il ne s’agit plus seulement de réparer les dégâts, mais d’anticiper les prochaines offensives dans un monde où la guerre numérique est déjà bien réelle.

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